La finance durable est-elle compatible avec la cryptomonnaie ?

La finance durable est une finance qui permet d’orienter son épargne vers des investissements plus responsables, ce qui permet de participer activement à des modèles économiques plus sains, plus égalitaires et plus vertueux, tout en réduisant notre empreinte carbone. Comment ? En investissant dans des entreprises qui contribuent au développement durable, et qui intègrent des considérations environnementales, sociales et de gouvernance dans leur stratégie. La finance responsable est le vecteur qui permet de concilier à la fois les performances financières, sociales, environnementales tout en préservant la croissance.

Dans un contexte où l’impact du monde numérique sur nos civilisations s’avère colossal, de nouveaux outils financiers émergent et par là de nouvelles organisations voient le jour.

En 2020, durant la première année de pandémie, nous avons assisté à une marée de nouveaux investisseurs intéressés par la cryptomonnaie. En 2021, les tweets d’Elon MUSK avaient une influence phénoménale sur le cours du bitcoin et d’autres cryptomonnaies.

Mais qu’est donc le BITCOIN, la première des cryptomonnaies qui affole tant de nouveaux épargnants ?

A l’origine, le bitcoin a été créé en 2008 par SATOSHI NAKAMOTO, pseudonyme dont l’identité n’a jamais été (volontairement…) révélée. SATOSHI NAKAMOTO pourrait être une femme, un homme, un groupe de personnes, une organisation, une Intelligence Artificielle…  

SATOSHI NAKAMOTO voulait une monnaie libre, désintermédiée des banques centrales, qui fonctionnerait en toute autonomie, sans frontières et dont la confiance reposerait sur tous ses participants.  Elle serait une monnaie alternative aux banques, aux grandes entreprises et aux États.

Dans le silence et l’anonymat de SATOSHI NAKAMOTO, la monnaie s’épanouie. Le Bitcoin devient alors peu à peu le nouvel or numérique ; comme l’or, la quantité de bitcoin est limitée (seuls 21 millions d’unités peuvent être créées), comme l’or, plus de chercheurs il y a, plus il est difficile d’en trouver, comme l’or, le bitcoin a ses mineurs.

Miner : c’est la clé de voute de la technologie bitcoin. La technologie bitcoin est un système monétaire dans lequel on détient et on transfère de l’argent. D’un point de vue informatique, cela se traduit par un registre qui répertorie la quantité d’argent détenue par chacun de ses détenteurs.

Dans le système décentralisé de Bitcoin, chaque participant de ce système conserve une copie de ce registre. Pour pouvoir transférer un bitcoin, le registre doit être modifié. Pour cela, cette transaction va être mise dans un groupe de transactions, les acteurs de la communauté appelés les mineurs, vont alors piocher dans ce groupe de transactions en attente et vont constituer un bloc. Tous ces mineurs vont alors être en compétition les uns avec les autres pour réussir à valider ce bloc de transactions, en résolvant une énigme très complexe et faire progresser la blockchain en créant un nouveau bloc. Lorsqu’un mineur a trouvé la combinaison, qui aura demandée des milliards et des milliards de tentatives (ce qui est très onéreux en matériel et énergie), il reçoit en échange des bitcoins. Le bloc est alors validé et rajouté au registre. C’est à ce moment-là que la transaction va être considérée elle aussi, comme validée et le bitcoin de départ est alors transféré.

La blockchain bitcoin est donc la technologie qui répertorie toutes les transactions faites en bitcoin depuis l’origine. Combinée à la preuve de travail (résoudre des équations complexes en échange d’une rémunération), cette technologie devient la blockchain bitcoin.

En utilisant cette technologie blockchain qui repose sur l’idée que chaque information est liée à l’information précédente et permet de retracer l’historique de chaque information, la blockchain bitcoin devient alors solide, infalsifiable dans laquelle toutes les transactions ont été vérifiées préalablement. Ce système de minage est au cœur même de la sécurité du système. Il est ainsi plus difficile de pirater des dizaines de milliers d’ordinateurs que la seule dizaine d’ordinateurs détenue par une banque.

 

Cette transition numérique du bitcoin est très consommatrice d’électricité, électricité provenant par ailleurs, des énergies fossiles (mines, gaz, pétrole), industries peu louables en matière de droits humains, d’impact environnemental et d’émission de gaz à effet de serre. La pollution numérique imprime sur notre monde réel une marque indélébile. La technologie bitcoin demande beaucoup de puissance de calculs nécessitant des investissements par les mineurs dans des machines spécifiques, cartes graphiques, serveurs, etc. Le minage dilapide les ressources naturelles et polluent l’environnement de manière excessive. A mesure que le cours du bitcoin augmente, l’intérêt pour le minage grandit lui aussi et la consommation d’électricité avec.

La philosophie même du bitcoin est d’être libre, pouvoir gérer ses propres données, être décentralisé, indépendant d’un système financier, avoir confiance en une communauté, etc sans pour autant négliger les impacts carbone.

A partir de 2014, de nombreux systèmes concurrents ont vu le jour, pour certains moins énergivores comme la plateforme Etherum, mais au détriment d’un certain niveau de sécurité.

D’après l’ONU, « l’un des aspects les plus utiles des crypto-monnaies, est la transparence. Parce que la technologie est résistante à la falsification et à la fraude, elle peut fournir un enregistrement fiable et transparent des transactions. Ceci est particulièrement important dans les régions où les institutions sont faibles et les niveaux de corruption élevés.

Le Programme alimentaire mondial (PAM), la plus grande agence des Nations Unies fournissant de l’argent humanitaire, a découvert que la blockchain peut aider à garantir que l’argent parvienne à ceux qui en ont le plus besoin. »

Depuis septembre 2021, le SALVADOR est le premier pays autorisant le bitcoin comme monnaie légale au même titre que le dollar américain. Cela a au moins le mérite de répondre au 1er des 17 objectifs de développement durable (ODD) énoncés par les Nations Unies en 2015 (destinés à orienter les efforts contre la pauvreté, les inégalités et l’injustice et pour atténuer le dérèglement climatique), celui de la pauvreté et l’inclusion financière. 1,7 milliards de personnes dans le monde n’ont pas accès à un compte bancaire (d’après Mesuring Financial Inclusion », the global finex database, 2017) et sont donc exclus socialement d’un système de santé, d’emploi, de logement, d’éducation, etc. Le bitcoin pourrait ainsi donner accès aux services financiers à davantage de personnes et aider à lutter contre les exclusions.

La blockchain et la technologie bitcoin peut être un moteur fondamental pour le développement durable. Toutefois, la difficulté réside à trouver des solutions à faible consommation d’énergies. En avril 2021, le Crypto Climate Accord formé par trois organisations importantes couvrant les secteurs du climat, de la finance, des ONG et de l’énergie, (l’Energy Web Foundation, le Rocky Mountain Institute et l’Alliance pour des régulations innovantes), a été signé avec pour objectif de « décarboner l’industrie en un temps record et d’atteindre zéro émission nette dans l’industrie mondiale de la cryptographie d’ici 2030 ».

Le bitcoin est aujourd’hui à la fois, une monnaie en devenir, un actif financier, une réserve de valeurs, un outil spéculatif et sa technologie peut améliorer les conditions des plus vulnérables. La technologie bitcoin a démontré son utilité et elle est certainement là pour rester, pour durer. Aussi, nous nous devons de chercher à l’améliorer.

L’un des auteurs d’une récente note de prospective de l’agence des Nations Unies pour l’environnement, le PNUE, Minang Acharya, indique sur les applications de la blockchain « Plus nous expérimentons, plus nous en apprenons sur la technologie. Cela est susceptible d’améliorer nos connaissances à l’échelle de l’ONU sur la blockchain, notre compréhension des implications environnementales et sociales des extractions et d’améliorer nos chances de faire face à tous les problèmes que la technologie pourrait apporter à l’avenir ».

Alors, la technologie blockchain bitcoin, s’intègre-t-elle dans une finance durable ou non ?

Laurence HONIEZNA

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