QUI PROFITERA DU MÉTAVERS ?

QUI PROFITERA DU MÉTAVERS ?

Il y a cinq ans le mythe du Métavers avait déjà interrogé Steven Spielberg qui lui a consacré un film: Ready Player One. « Les gens vont dans l’OASIS pour pouvoir faire ce qu’ils veulent, mais ils restent pour pouvoir être ce qu’ils veulent ». C’est ce que dit le protagoniste au moment d’entrer dans un univers complètement virtuel. Et il ajoute : « C’est le seul endroit où j’ai l’impression d’être quelqu’un ».

 

Spielberg avait compris déjà le côté « ensorcelant » de ces technologies. Le rêve de s’échapper de la pesanteur de la vie matérielle. Les métaverses donnent l’impression de nous délivrer des contraintes du temps et de l’espace, des efforts physiques du travail, des efforts moraux pour vivre avec les autres. Et ils nous fournissent une nouvelle identité avec les Avatars, que l’on peut choisir pour nous représenter.

Le décor et les dynamiques de ces univers virtuels sont issus du roman futuriste Snow Crash (Le Samouraï Virtuel dans l’édition française) publié en 1992 par Neal Stephenson, qui avait conquis à l’époque une foule de geek de l’informatique, d’ingénieurs et d’entrepreneurs de la Silicon Valley.  Entre autres le fondateur d’Amazon Jeff Bezos, pour lequel Stephenson a travaillé pendant six ans, comme conseiller, dans l’autre société, Blue Origin, que Bezos a créée pour les voyages dans l’espace.

Le décor et les dynamiques de ces univers virtuels sont issus du roman futuriste Snow Crash (Le Samouraï Virtuel dans l’édition française) publié en 1992 par Neal Stephenson, qui avait conquis à l’époque une foule de geek de l’informatique, d’ingénieurs et d’entrepreneurs de la Silicon Valley.  Entre autres le fondateur d’Amazon Jeff Bezos, pour lequel Stephenson a travaillé pendant six ans, comme conseiller, dans l’autre société, Blue Origin, que Bezos a créée pour les voyages dans l’espace.

 

Une curieuse coïncidence historique s’est produite, en reliant deux Stephenson. 

Le premier, George Stephenson, ingénieur britannique, a inventé en 1825 la première locomotive à vapeur, une machine qui roulait à 30 km l’heure. La plus célèbre, dénommée La fusée (The Rocket) a permis de relier Liverpool à Manchester à partir de septembre 1830 en créant la première ligne de voyageurs sur les rails. Adieu aux diligences, une nouvelle époque est née. Associé aux télégraphes, le train a commencé à transformer notre rapport aux temps.

Le deuxième, a cherché plutôt à transformer notre rapport à la réalité, à travers ce que  des américains indiquent comme « The Next Step Computing ». Neal Stephenson, est né en octobre 1959 à Fort Mead, dans le Maryland, fils d’un professeur de génie électrique et d’une biochimiste, et il a fait des études en physique à l’université de Boston. Il vit actuellement à Seattle, où il continue son activité d’écrivain de science-fiction. Mais depuis décembre 2014,  il est devenue aussi « Chief Futuriste » de la société Magic Leap. 

Cette start-up, fondée par Rony Abovitz en 2010, cherche depuis une dizaine d’années à inventer un métavers universel. De sa création Magic Leap a levé 2 milliards de dollars pour développer une technologie propriétaire de réalité augmentée. Les investisseurs? Google, AliBaba, Qualcomm et Andreessen Horovitz (qui avait lancé le premier navigateur Netscape). En 2018 la société a sorti un casque de réalité augmentée, le Magic Leap One, et cette année des lunettes pour la réalité virtuelle.

Stephenson (photo ci-dessus) n’a pas seulement imaginé ce que pourrait être le métavers, il a cherché aussi de le bâtir. Et son aventure n’est qu’un début.

Dans un article paru sur Wired, la célèbre revue américaine de cyber-culture, le 16 septembre avec le titre « Neal Stepheson Named the Metaverse. Now, He’s building it »  l’auteur, Steven Levy, a écrit:  « Stephenson entre maintenant sur le marché avec sa propre vision de la façon dont son concept fictif pourrait devenir un monde imaginaire réel. Il s’associe à un spécialiste de la cryptographie, Peter Vessenes, qui dirige la Fondation Bitcoin, pour lancer Lamina1, une entreprise qui espère créer l’équivalent d’un échafaudage sur lequel les créateurs pourront construire un métavers ouvert. »

« C’est comme si Neal descendait des montagnes comme Gandalf, pour restaurer le métavers dans un ordre ouvert, décentralisé et créatif », déclare Rony Abovitz, l’ancien PDG de Magic Leap, qui est devenu le conseiller stratégique de Lamina1.

La conclusion qu’en tire le journaliste de Wired est bien actuelle : « Que l’entreprise fonctionne ou non, Lamina1 a une mission cruciale. L’histoire de la technologie informatique a eu pour leitmotiv ennuyeux de forcer les utilisateurs et les développeurs à choisir leur camp. MS-DOS ou Apple. Windows ou Mac. Apple ou Androïd. Les plates-formes ont dominé des catégories de produits entiers, étouffant la créativité et tout simplement l’accessibilité, en excluant les systèmes concurrents ».

 

Le même risque, plus que jamais, se pose aujourd’hui à l’aube du métavers. Chaque big company veut son propre métavers : Facebook a investi des dizaines de milliards dans ses Reality Labs pour réaliser son projet et a fini par se renommer Meta. Microsoft a poussé sa stratégie pour un métavers dédié au travail. Amazon est en train de développer le 3D shopping avec des outils comme le AR Room Decorator, qui vous offre la possibilité de voir virtuellement les meubles à acheter déjà disposés dans votre maison. On ne sait pas encore comment Apple cherchera à entrer dans cette nouvelle frontière numérique, mais certainement ses techniciens y travaillent déjà.

Voici les différents métavers déjà en phase d’expérimentation ou d’utilisation:

 

A gauche l’avatar de Zuckerberg, Pdg de Meta, en réunion dans son métavers Horizon.


Le problème est que jusqu’au ici « Les métaverses sont quasiment déserts » comme signale un article dans le journal « Les Echos » publié le 12 octobre. Malgré leur valorisation importante, les principaux métavers utilisant la blockchain ont une audience anecdotique : « The Sandbox, qui concentre ses utilisateurs sur des périodes de quelques semaines pour maximiser son audience, fait état de 39.000 visiteurs uniques par jour et de 201.000 utilisateurs par mois. Decentraland, de son côté, communique sur 56.697 utilisateurs actifs mensuels » écrit Les Echos.

La stratégie de Mark Zuckerberg aussi n’a jamais suscité autant de doutes à Wall Street : en bourse l’action de sa société a chuté de 66% depuis septembre 2021.  Plusieurs défis majeurs se dressent devant Meta. La société devra convaincre le public d’acheter et de porter des casques ou des lunettes de réalité virtuelle. Enfin, elle devra trouver le bon moyen de monétiser ce nouvel univers.

Et pourtant le buzz autour du métavers est tel que beaucoup de marques et d’entreprises sont à la recherche des places dans ces univers virtuels.

« Les réunions dans le Métavers pourraient devenir une réalité pour des millions de travailleurs britanniques dans un avenir proche après qu’une étude ait révélé que des centaines d’entreprises recherchent ou construisent des bureaux dans la technologie virtuelle » signale Advanced Television. « Les recherches menées par Regus, qui fait partie du plus grand groupe mondial d’espaces de travail flexibles IWG, ont révélé que les deux tiers (66 %) des chefs d’entreprise considèrent le Métavers comme la progression naturelle du travail hybride, et que la moitié (48 %) explorent l’espace de bureau dans le monde en ligne pour leurs employés ».

En permettant aux travailleurs de différents endroits d’interagir via des avatars 3D, les patrons pensent que le métavers aura un impact significatif sur la façon de travailler. Environ 70% s’attendent à ce que cela augmente la demande de travail flexible, car cela réduira la nécessité pour le personnel de travailler à partir du même lieu de travail.

 

Comment les métaverses deviendront utiles ?

Gartner estime que 25% des humains passeront au moins 1 heure par jour dans les métaverses d’ici au 2026. Pour quelles activités?

Plusieurs applications possibles de ces mondes virtuels ont été présentés à la conférence « Qu’est-ce que le Métavers ? » organisée en novembre à Mandelieu en #IADATES avec le concours du Département des Alpes-Maritimes, de la Maison de l’Intelligence Artificielle, l’Institut EuropIA et la Ville de Mandelieu. À cette occasion le métavers a été considéré selon la définition qui indique les caractéristiques suivantes:

– Un environnement numérique interactif et persistant, à partager en temps réel avec d’autres utilisateurs dans des espaces virtuels accessibles au travers d’interfaces

Les activités possibles prises en compte ?  Voici quelques pistes

– L’expérience d’e-commerce en 3D

– Les visites virtuelles des Musées et la découverte de la crypto-art

– Les Événements culturels, comme les concerts

– Les classes virtuelles pour la Formation

– Le training pour les applications médicales

– Les jumeaux numériques dans l’Industrie pour faciliter maintenance et optimisation

– Un nouvel outil pour les ressources humaines pour recruter et sélectionner du personnel

– Un environnement pour entrainer des forces armées ou de gendarmerie sur le territoire

– Un espace où reconstituer des scènes de crime pour les enquêteurs et juges

– Un marketplace où acheter de biens virtuels ou investir sur l’immobilier dématérialisé.

Bloomberg prévoit déjà un marché mondial du métavers de la taille de 800 milliards de dollars en 2024. Les banques d’affaires J.P. Morgan et Morgan Stanley estiment le potentiel du métavers beaucoup plus haut, à des trillions de dollars dans la prochaine décennie.

Mais ces estimations ont été faites avant la crise énergétique actuelle et elles ne tiennent pas compte de variables comme les enjeux liés aux changements climatiques et ses conséquences. Les activités numériques actuelles absorbent déjà 10 pour cent de l’électricité mondiale et représentent plus de 4% des émissions de CO2 éjectées sur la planète. Pourrons-nous permettre de continuer à bâtir des mondes virtuels super gourmands d’ énergie et fortement polluants, sans qu’ils soient vraiment utiles?

Marco Landi et Chiara Sottocorona

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